À peine les écoles rouvertes que déjà s’annoncent les vacances d’été. Que penser des avis alarmistes de certains spécialistes de l’éducation ? Les vacances vont-elles continuer de creuser le déficit d’enseignement de ces derniers mois ? Pas de panique ! Les vacances sont là et c’est plutôt une bonne nouvelle pour les enfants. Dans la balance du pour et du contre, les congés l’emportent haut la main.
Quelles solutions pour pallier les lacunes des derniers mois ?
Les « vacances apprenantes » de l’Education nationale
Comme chaque année, les écoles proposent des stages de soutien en juillet et en août dans l’établissement de l’élève ou du moins dans une école proche du secteur. Cette année, ce dispositif se veut renforcé pour venir en aide aux élèves en besoin. Il devrait concerner un million d’élèves pendant l’été. Le principe retenu sera « entièrement gratuit pour les familles les plus modestes, dont les enfants seront prioritaires », a précisé Jean-Michel Blanquer, le Ministre de l’Education nationale. La gratuité était déjà de mise les années précédentes. Mais la nouveauté tient dans la pluralité des déclinaisons possibles, c’est-à-dire en dehors des cours à proprement parler.
Ainsi, le secrétaire d’Etat à la Jeunesse, Gabriel Attal a annoncé que l’Etat financerait « 250 000 départs en colonies de vacances apprenantes, dont 200 000 réservées aux jeunes issus de quartiers prioritaires de la ville » (source l’Express). De plus, les centres aérés devraient être mobilisés pour renforcer les apprentissages. Au total, 400 000 jeunes de moins de 17 ans pourraient bénéficier de soutien scolaire.
Cependant, les modalités de cette ambition politique restent à définir localement. De plus, elle suppose la mobilisation de 25 000 enseignants d’après M. Blanquer. Le recours au tissu associatif fournira sans doute un personnel encadrant. Mais il n’est pas certain que les 2 500 établissements scolaires concernés soient suffisamment dotés. Il faudra attendre la fin de l’été pour tirer un bilan : taux de fréquentation, assiduité, programmes et activités réellement mis en oeuvre…
Cahiers et devoirs de vacances sont-ils souhaitables ?
Par ailleurs, comment soutenir les apprentissages en dehors de ces dispositifs ? Pour tous les élèves, qu’ils soient décrocheurs ou non, les vacances d’été induisent une baisse des connaissances. Cette année, la crainte est d’autant plus forte que les précédents mois n’ont pas pu assurer la totalité des programmes. S’il y a bien eu continuité pédagogique pour une majorité d’élèves, les nouvelles notions ont été reportées à la rentrée prochaine. Par conséquent, il serait tentant de rattraper ce retard par des devoirs de vacances. Mais cette idée pourrait s’avérer préjudiciable aux élèves. Pour plusieurs raisons :
- les cahiers de vacances ou devoirs ne peuvent être que des révisions,
- le travail encadré par les parents demeure corrélé au confinement et revêt donc un aspect négatif,
- les élèves sont sortis éreintés et démotivés du confinement, un énième travail écrit ne résoudra pas cette problématique.
En fait, nous sommes face à un dilemme. D’un côté la nécessité d’aider, d’accompagner nos enfants pour qu’ils progressent au mieux de leurs capacités. De l’autre, le besoin de lâcher-prise et de renouer avec la notion de plaisir. Comment concilier bonne humeur et apprentissages ? Seule certitude, d’ailleurs défendue par Jean-Michel Blanquer, les chances de réussite augmentent lorsqu’on apprend en s’amusant.
Vacances ludiques et éducatives
Pendant le confinement, l’offre de jeux et d’activités éducatives a explosé. Ces contenus restent toujours accessibles et valables pendant les vacances. Entre les séances de sport, les DIY (fabrication maison) et les applications intelligentes, on trouve forcément une activité à son goût. De plus, avec la réouverture des lieux publics, musées, cinémas, ateliers pour enfants, les vacances s’annoncent riches en propositions. D’ailleurs, toutes ces situations d’apprentissage, apportent autant de nouveaux contenus que de compétences psycho-sociales. Les compétences de savoir être, de vivre ensemble ont pu faire défaut ces derniers mois et faire craindre une désocialisation. Heureusement, elles ont été réactivées récemment et conduisent tout naturellement à une reprise des relations sociales pendant l’été.
Par ailleurs, les apprentissages ne se limitent pas à l’école. Les domaines de connaissances sont infinis et les moyens de les appréhender très varié. Posons la question directement à nos enfants ! Qu’aimerais-tu apprendre ? Cuisiner, patiner, coder, nager, jouer du ukulélé ? La diversité des réponses est surprenante et réjouissante ! Le moteur de l’apprentissage se trouve justement dans cet enthousiasme, dans cette soif d’apprendre, quel que soit l’objet de connaissance. C’est pourquoi les écoles fonctionnent souvent avec des projets, pour rendre plus concrets ce qui est appris, pour impliquer et motiver les élèves. Malheureusement cette année, combien de classes vertes annulées ? de sorties scolaires et de spectacles de fin d’année ajournées ?
Et si on parlait plutôt de vacances enrichissantes ?
Redonner confiance
Il est d’ores et déjà prévu à la rentrée que les enseignants évaluent leurs élèves afin de définir leurs lacunes. La plupart des professeurs ont déjà l’habitude de procéder ainsi à chaque rentrée. Cela leur permet de s’adapter aux besoins de leurs élèves et de programmer les progressions d’apprentissage. Il n’y a donc pas lieu de s’inquiéter outre mesure des connaissances et compétences non acquises en fin d’année. Cela fait partie du travail des enseignants de s’emparer de cette problématique.
Même si certains spécialistes ont récemment fait part de leurs inquiétudes concernant le déficit d’apprentissage, ils ciblaient davantage un public d’ados décrocheurs que d’élèves de primaire ou début de collège. Bien sûr, les jeunes déjà en difficulté avant le confinement ont sans doute perdu beaucoup dans cette interruption et vont devoir faire face à des répercussions dans le futur proche.
De plus, les élèves des filières professionnelles n’ont pu effectuer leurs stages, ce qui les pénalisent fortement par rapport aux élèves des filières générales. Cependant, il serait aberrant de condamner à l’échec des jeunes qui n’ont pas encore eu le temps de réagir ni de prendre de décisions. Ils ont été fragilisés, mais le plus important pour eux est de reprendre confiance et de retrouver la motivation pour agir et se prendre en main.
… et maintenir une stimulation aux apprentissages
Mais pour la grande majorité des 12 millions d’élèves en France, la continuité pédagogique a su maintenir la flamme de l’apprentissage. Le psychiatre Mario Sperenza interrogé par France Info le 3/06/20 tente de rassurer les parents. Selon lui, « une période de deux mois ne change pas la dynamique d’apprentissage s’il y a eu un peu de stimulation. »
Finalement, l’accumulation de connaissances compte moins que la posture d’apprenant. Tant que l’enfant s’inscrit dans une dynamique de développement, qu’il reste connecté aux apprentissages, il devrait se remettre au travail sans difficulté en septembre.
Relâcher la pression pendant les vacances
En effet, pour l’heure, il apparaît surtout essentiel de recréer un climat plus serein. Parents comme enfants ont besoin d’une pause et d’évacuer de leur quotidien le trop plein de scolaire. Ces derniers mois, les parents ont relevé le challenge de l’école à la maison. De plus, ils ont souvent dû faire face à la frustration, à l’échec et à la culpabilité. Il est temps pour tout le monde de retrouver son rôle de parent et d’évacuer la pression. Pression due au travail scolaire, mais aussi due à la cohabitation, au manque d’intimité dans des espaces parfois restreints. En particulier dans les grandes villes, l’absence d’accès à l’extérieur a pu renforcer la sensation d’enfermement.
Par ailleurs, le manque de contact avec d’autres enfants du même âge, avec les amis et camarades de classe, a pesé sur le moral des enfants. Pour beaucoup, la privation nette de tout contact pendant une si longue période a engendré des troubles. Comme le relève Mario Sperenza, certains jeunes ont rencontré des troubles du sommeil, voire de l’anxiété, ainsi qu’un dérèglement de l’alimentation. Ainsi, la levée du confinement a contribué à améliorer la santé mentale des enfants. Dans cette logique, les vacances s’inscrivent dans ce même besoin de passer à autre chose, de s’évader de l’ordinaire et des souvenirs des derniers mois.
De ce fait, le grand air, la plage, la forêt ou la campagne deviennent des lieux privilégiés de résilience pour toutes les familles. Alors, c’est le moment de vous souhaiter d’excellentes vacances à tous !